Le mois dernier, Rudy Castellani, professeur de pathologie à l’Université du Maryland, a reçu le prix Alzheimer 2010 pour un article publié en 2009 dans le Journal of Alzheimer’s Disease : Castellani et al. (2009). Reexamining Alzheimer’s disease : Evidence for a protective role for Amyloid-beta protein precursor and Amyloid-beta. Journal of Alzheimer’s Disease, 18, 447-452. Ce prix a été accordé à la suite d’un vote de 310 éditeurs associés du Journal of Alzheimer’s Disease, visant à sélectionner le meilleur article paru dans ce journal durant l’année 2009.
Cet article conteste l’idée selon laquelle les plaques séniles, le traitement précurseur de la protéine b-amyloïde et le métabolisme de la protéine bêta-myloïde jouent un rôle causal dans la « maladie d’Alzheimer ». L’accumulation de bêta-amyloïde serait en fait plutôt un épiphénomène et elle pourrait même avoir un effet protecteur, jouant un rôle d’antioxydant, de chélateur des métaux et de détoxifiant des oligomères.
La contribution la plus importante de cet article est peut-être de montrer en quoi l’approche dominante de la pathogenèse de la « maladie d’Alzheimer » (basée sur l’exploration de cascades de petites molécules) est fondamentalement réductionniste et rétrograde et qu’elle a empêché le financement de recherches explorant d’autres hypothèses ou adoptant d’autres paradigmes du vieillissement cérébral.
Rudy Castellani (voir le blog « The Tangled Neuron ») ajoute qu’il y a derrière cette approche réductionniste et très problématique d’importants enjeux financiers et d’influence. Il indique que la recherche sur la « maladie d’Alzheimer » implique de vendre des idées autant, voire davantage, que de poursuivre la recherche de la connaissance, et cela avec l’aide de la plupart des médias qui répercutent les citations par trop simplistes de certains experts promettant la prochaine suppression des « mauvaises molécules ». Il ajoute que « le processus d’examen par les pairs des articles scientifiques (« peer review process ») a quelque chose d’une farce, en ce qu’il encourage l’allégeance à des idées existantes et entrave l’innovation […]. ».
Il faut par ailleurs noter que, si l’hypothèse amyloïde est fausse, il s’ensuit que les marqueurs biologiques qui sont censés contribuer au diagnostic de la soi-disant « maladie d’Alzheimer » en identifiant la présence de plaques séniles ou de dégénérescences neurofibrillaires en deviennent non pertinents. Plus généralement, c’est l’existence même de la « maladie d’Alzheimer », en tant que « maladie spécifique », qui est mise en cause (voir nos chroniques « Le génotype ApoE a des effets dissociables sur les processus mnésiques et attentionnels/exécutifs : Une étude intéressante mais erronément focalisée sur la maladie d’Alzheimer » et « Le diagnostic de la prétendue maladie d’Alzheimer repose-t-il sur des critères valides ? »).
Rudy J. Castellani, Professeur de pathologie et directeur de la neuropathologie à l'University du Maryland.
Castellani, R.J., Lee, H.G., Siedlak, S.L., Nunomura, A., Hayashi, T., Nakamura, M., Zhu, X., Perry, G., & Smith, M.A.(2009). Reexamining Alzheimer's disease: evidence for a protective role for amyloid-beta protein precursor and amyloid-beta. Journal of Alzheimer’s Disease, 18, 447-452
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